« J’aime créer une signature visuelle » : entretien avec Laurent Barrera

par Wipplay
© Laurent Barrera

Réalisé en partenariat avec Le Carreau du Temple, le concours VÉGÉTAL offrait la possibilité aux wipplayeurs de partager leurs plus beaux clichés de la flore, de la feuille au fruit, du champ au bouquet, des plantes gastronomiques aux plantes médicinales, de l’arbre à l’assiette. Le concours, organisé à l’occasion du festival Food Temple prévu du 22 au 24 septembre 2023 a vu la photo « la koï et la nymphéa” de Laurent Barrera être nommée lauréate, découvrez son interview !

Commençons par votre parcours : d’où venez-vous et où êtes-vous basé actuellement ? 

Je suis né à Marseille et j’ai passé mon enfance entre le Pacifique Sud et la Provence. Après une brève carrière d’ingénieur géologue dans l’océan Indien, je suis devenu vigneron. 

Lors de mes nombreux voyages pour exporter mes vins au Japon, j’ai pu découvrir une esthétique et un rapport à la beauté qui m’ont influencé fortement notamment dans ma pratique martiale, spirituelle et artistique.

En 2019, j’ai remporté, avec une de mes photos sur les carpes Koï, le grand prix du concours photo d’Arles présidé par Sam Stourdzé pour les 50 ans du festival et les 100 ans de Olympus. J’y ai vu comme un signe de la vie, un encouragement à me lancer à temps plein dans une pratique artistique (photographique).

Après avoir vendu mon domaine viticole, j’ai installé mon atelier à Toulon et j’ai commencé à participer à plusieurs festivals tels que Photomenton, les Rencontres du Prieuré de Salaize, les Nuits de la photographie de Pierrevert, Besançon, Présence Photographie à Montélimar, Phot’Aix…

J’ai également réalisé un livre photo «Koï» imprimé en auto-édition chez Escourbiac.  Cet ouvrage a remporté le premier prix au festival international de Namur 2022 catégorie livre photo.

Travaillez-vous sur des projets en ce moment ? Si oui, lesquels ? 

Je travaille actuellement sur deux projets photographiques.

Le premier concerne un territoire : la basse vallée du Rhône et son estuaire. C’est un projet qui a été initié lors d’un stage aux rencontres d’Arles avec Marguerite Bornhauser, une photographe très créative et talentueuse. Il me permet de développer un narratif autour de la mythologie gréco-romaine et une réflexion sur l’identité et la forme. Ce travail sera présenté à Arles en 2024.

Le deuxième qui fera probablement l’objet d’un livre photo porte sur le moine bouddhiste Kukai qui est une des figures les plus marquantes de l’histoire du Japon. Sa vie et ses enseignements sont passionnants. J’ai à cœur de faire découvrir cette partie de l’histoire japonaise datant du 8ème siècle par un travail photographique esthétique et documentaire.

Je suis réaliste et je me dis que ce sera compliqué. Toutefois, le prochain voyage au Japon est programmé pour le printemps 2024 lors des cerisiers en fleur !

© Laurent Barrera

Quelle est votre méthode de travail ?

Je suis plutôt dans une démarche «d’opportunité». Être attentif à ce que la vie, le quotidien m’apporte de magique qui mérite d’être pris en photo. Bien sûr, tout ne mérite pas d’être montré.

Les projets longs et monographiques méritent cependant un vrai travail de recherche et des visites de lieux ou des déplacements avec des intentions bien précises.

En termes de rendu photographique, recherchez-vous quelque chose de particulier ? Pouvez-vous nous livrer des secrets de fabrication/astuces ?

J’aime créer autour de mes photographies une ambiance, une signature visuelle. Celle-ci s’appuie sur mes goûts personnels et donc sur des esthétiques que j’ai développé notamment dans ma série «Koï». 

Au Japon, le yūgen, c’est la pénombre, l’obscurité. J’aime cette idée que tout n’est pas montré ou évident.  Cela laisse de la place au regardeur, au public pour créer leurs propres interprétations et d’y poser leurs émotions.

Une astuce consiste à faire confiance à l’imagination et donc à ne pas vouloir trop expliquer. Être sobre et simple, comme le propose le Zen.

© Laurent Barrera

Parlons de la photo qui vous a valu le premier prix du concours VÉGÉTAL : quand et où avez-vous pris ce cliché ? Racontez-nous le contexte.

Elle a été prise l’été 2022 en fin de journée dans le jardin Zen d’Erik Borja. C’est un parc qu’il faut absolument aller visiter si vous passer dans la Drôme. 

Sur la photo, on y voit deux carpes mais le sujet est ailleurs, c’est en effet, le végétal et la couleur ! Le concours portait sur le végétal et le festival partenaire du concours était lié à l’alimentation (Food temple au Carreau du temple à Paris). 

Il y avait un clin d’œil avec le nénuphar qui est également une plante comestible (appréciée dans la cuisine asiatique).

© Laurent Barrera

Votre photo « la koï et la nymphéa » fait-elle partie d’un projet en particulier ? 

Cette photographie n’est pas dans mon livre Koï car elle a été réalisée postérieurement. J’ai continué la série en la faisant évoluer vers plus de végétal et plus d’ambiances aquatiques.

Cela me permet d’élargir le propos au-delà des carpes japonaises vers un univers plus poétique et laissant plus de place au rêve et à la flânerie méditative.

Dernière question ! Parmi tous les talentueux utilisateurs Wipplay est-ce qu’il y a un (ou plusieurs) compte (s) dont vous appréciez particulièrement le travail, et que vous conseilleriez ? 

J’en ai plusieurs car la qualité est au rendez-vous sur Wipplay ! Pour rester sur le concours Végétal, je citerais Adeline Spengler et ses « fleurs vagabondes », prix du public. J’aime énormément son univers visuel et j’admire son évolution et sa créativité.

Lors du vernissage au Carreau du temple en septembre dernier, j’avais rencontré le deuxième prix du concours, Gérard Heloïse, dont j’apprécie les forêts martiniquaises oniriques.

Enfin, pour ce qui est du travail en argentique, je suis fan de celui de Edwi Na, vraiment à découvrir.

© Adeline Spengler
© Edwi Na