«J’aimerais réussir à montrer la valeur de ce que nous avons sous nos yeux»

par Wipplay
© Anne Hascoët

Organisé en fin d’année dernière en partenariat avec le pôle de photographie Stimultania , le concours BROUILLARD invitait les participants à capturer ce phénomène météorologique aux vertus esthétiques indéniables. Grâce à son cliché intitulé Catch your dreams !, qui montre un pêcheur lancer sa ligne au pied d’un pont plongé dans la brume aux alentours de Lisbonne,Anne Hascoët a obtenu le premier prix du jury. Nous avons posé quelques questions à cette lauréate pour découvrir son univers artistique. Bonne lecture !

Commençons par votre parcours : d’où venez-vous et où êtes-vous basée actuellement ? 
J’ai vécu ces vingt dernières années à Paris, dans le Finistère et à Lisbonne. Je me partage aujourd’hui entre ces trois régions, auxquelles je suis très attachée.

Quand je suis arrivée à Lisbonne en 2015, pour des raisons professionnelles sans rapport avec la photo, j’ai aimé découvrir cette ville, être surprise, être séduite, et j’ai voulu collectionner ces souvenirs – à titre personnel. J’ai donc ouvert un compte Instagram (@anne.hascoet.lisboa) où j’ai commencé à poster mes instantanés de Lisbonne. Mon entourage a apprécié, et m’a encouragée à continuer.

Quelques années après, j’ai pu consacrer plus de temps à la photographie. J’ai appris à utiliser un appareil reflex, visité expos et festivals, et commencé à participer à des concours. En 2021, le MoMA a retenu une de mes photos pour le tout premier concours de leur photoclub ; j’ai obtenu deux mentions honorables aux International Photography Awards en 2021 et 2022 ; l’an dernier un de mes portraits a obtenu un « LensCulture editor’s pick », et cette année j’ai donc remporté le concours « Brouillard » de Wipplay.

© Anne hascoët

Travaillez-vous sur des projets en ce moment ? Si oui, lesquels ?
Je continue de publier mes photos de Lisbonne. J’évite les clichés touristiques, je montre ce qui me touche dans cette ville. Je travaille aussi les légendes, assez courtes : j’aime associer l’image et le texte.
Je fais aussi beaucoup de photos à Paris, en Bretagne, en voyage. J’ai toujours mon appareil avec moi, je marche et je regarde. Les sujets sur lesquels je cherche à construire des projets (l’enfance, la vieillesse, le féminisme, la nature, la solitude…) sont quotidiens et universels. Notre époque met le sensationnel en avant, moi j’aimerais réussir à montrer la valeur de ce que nous avons sous nos yeux, tous les jours.

Quelle est votre méthode de travail ?
J’ai besoin d’associer théorie et pratique. Je travaille ma technique et mon regard à travers des expos, des MOOC, des livres, des masterclass… Dans ma pratique, je m’efforce de sortir de ma zone de confort, pour continuer à apprendre : les concours avec des thèmes imposés, comme ceux de Wipplay, sont de bonnes opportunités.
Je veux aussi travailler sur des séries, et donc sur la notion de sélection d’images. J’ai créé un lieu (@anne.hascoet.ailleurs) où je fais depuis un moment l’exercice d’assembler mes photos 3 par 3, en piochant dans ma photothèque. Prochaine étape: essayer d’inverser ma démarche habituelle, c’est à dire choisir un thème puis le photographier pour le documenter et toucher un public.

En termes de rendu photographique, recherchez-vous quelque chose de particulier ? Pouvez-vous nous livrer des secrets de fabrication/astuces ?
Je crois que ce que je cherche, c’est à orienter mon regard sur quelque chose de «beau», quelque chose qui me touche, qui m’apporte une émotion positive. Cela se pratique très bien sans appareil, il suffit d’ouvrir les yeux et de cadrer son regard, et c’est déjà très satisfaisant ainsi. Mais la photo a ceci de merveilleux qu’elle me permet de conserver la trace de cette émotion, et aussi de la partager avec d’autres…
Je n’ai pas de secrets de fabrication, j’ai toujours le même équipement et je travaille très peu mes photos après la prise de vue. Une astuce qui m’a été très bénéfique, ça a été de passer à une focale fixe : cela m’a vraiment fait progresser en terme de cadrage, de positionnement par rapport à mes sujets. Ce n’est pas très onéreux – il y a de bons 50 mm autour de 100 euros – et ça vaut le coup de persévérer pour changer ses réflexes liés au zoom.

© Anne Hascoët

Parlons de la photo qui vous a valu le premier prix du concours BROUILLARD : quand et où avez-vous pris ce cliché ? Racontez-nous le contexte.

J’ai pris cette photo à Lisbonne, un de ces matins d’automne où le brouillard stagne sur le Tage. Des hauteurs de Lisbonne, vous voyez le brouillard à vos pieds, c’est impressionnant et beau – un peu comme quand vous êtes en montagne et qu’un nuage occupe la vallée. J’ai filé au bord du Tage avec mon appareil. J’ai pris pas mal de photos ce matin là, dans cette ambiance très particulière et poétique due au brouillard : des photos des joggeurs, des grues du port, du Pont du 25-Avril qui disparaissait au beau milieu du fleuve…

Au bord du Tage, il y a toujours des pêcheurs. Je surveillais ces deux-là du coin de l’œil, et je me suis déplacée derrière eux jusqu’à trouver un positionnement satisfaisant, avec en arrière plan le pont qui s’effaçait dans le brouillard. Ensuite, je n’ai eu qu’à attendre que l’un des deux lance sa ligne à l’eau, ce qu’il a fait avec beaucoup d’élégance !

Votre photo « Catch your dreams », fait-elle partie d’un projet en particulier ? 
Elle fait partie de mon compte Instagram sur Lisbonne que j’aimerais beaucoup décliner et adapter sous la forme d’un livre.

Dernière question : parmi tous les talentueux utilisateurs Wipplay, est-ce qu’il y a un (ou plusieurs) compte (s) dont vous appréciez particulièrement le travail, et que vous conseilleriez ? 

J’ai surtout utilisé Wipplay pour participer à des concours. Je découvre maintenant le blog Wipplay, qui permet de découvrir des auteurs et des séries vraiment intéressantes, comme «Tentatives» de Jean Claude Delalande. Et cette semaine, le menu « Photos » m’a conduite de fil en aiguille à l’univers de Solenne Brout, très poétique. Bref, il me reste encore beaucoup à découvrir dans les pages Wipplay !

© S. Brout